Lettres reçues par le comte Jean-Baptiste de Sade, ministre plénipotentiaire du roi auprès de l'Électeur de Cologne, de Denis Malbran de La Noue, ministre auprès de la Diète d'Empire, et du duc de Noailles, commandant en chef de l'armée d'Allemagne pendant la guerre de succession d'Autriche.

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Lettres reçues par le comte Jean-Baptiste de Sade, ministre plénipotentiaire du roi auprès de l'Électeur de Cologne, de Denis Malbran de La Noue, ministre auprès de la Diète d'Empire, et du duc de Noailles, commandant en chef de l'armée d'Allemagne pendant la guerre de succession d'Autriche.

Cote/Cotes extrêmes

1AE/164 (Cote de commande)

Date

1741-1743

Organisme responsable de l'accès intellectuel

Centre des archives diplomatiques de Nantes

Description physique

16 lettres

Origine

Jean-Baptiste Joseph François, comte de Sade, né le 12 mars 1702 à Mazan (Vaucluse), mort le 24 janvier 1767 au Grand-Montreuil (faubourg de Versailles)

Biographie ou Histoire

Le destinataire des lettres, Jean-Baptiste, comte de Sade, seigneur de Saumane et de La Coste, coseigneur de Mazan, père du marquis de Sade (né en 1740), fut « l'un des plus brillants modèle de libertin sous le règne de Louis XV » (M. Lever).
Aîné d'une famille de la vieille noblesse provençale dont les membres occupèrent les plus hautes charges localement, il est le premier à s'aventurer à la cour, dès 1721. Il s'y place sous la protection du duc de Condé, qui devient principal ministre à la mort du Régent en décembre 1723, et entre comme capitaine de dragons dans son régiment. Il épouse en 1733 Marie-Éléonore de Maillé de Caraman, fille de la dame d'honneur de la princesse de Condé, qui occupe à son tour cette fonction, conduisant le couple à s'installer à l'hôtel de Condé.
Sade ambitionne une « carrière politique », c'est-à-dire de servir dans les ambassades. Il se voit confier en 1723 une mission à La Haye, puis en 1727 au duché de Saxe-Gotha. En 1730, il est nommé ambassadeur de France à la cour de Russie, mais la mort du tsar Pierre II empêche l'effet de cette ambassade. Le cardinal Fleury, principal ministre, le charge alors d'une négociation confidentielle à la cour de Londres. Il fait en 1734-1735 les campagnes du maréchal de Villars, et obtient du roi en 1739 la charge de lieutenant général des provinces de Bresse, Bugey, Valromey et Gex (office qui confère une rente annuelle et n'impose pas de résidence).
En janvier 1741, il est nommé ministre plénipotentiaire auprès de l'Électeur et archevêque de Cologne, Clément-Auguste de Bavière. Parti seul, il s'installe à Bonn le 10 février et est reçu pour sa première audience le 4 mars. Au commencement de la guerre de succession d'Autriche (1740-1748) qui voit la France soutenir son allié Frédéric II de Prusse contre Marie-Thérèse de Habsbourg, reine de Bohême et de Hongrie et successeur désigné par son père, l'empereur Charles VI, mort en 1740, Sade doit inviter l'Électeur de Cologne à soutenir son frère Charles-Albert, Électeur de Bavière, candidat au trône impérial. Tandis que les armées françaises envahissent Prague, il parvient à le rallier au traité de Nymphenburg qu'il a préparé, qui est signé le 28 mai 1741 par la France, l'Espagne, les Deux-Siciles, l'Électeur palatin et l'Électeur de Cologne. Charles-Albert de Bavière est élu empereur le 24 janvier 1742, sous le nom de Charles VII. Après cette victoire diplomatique, les relations entre Sade et l'Électeur de Cologne se dégradent en 1742 ; le ministre obtient de la cour de France la permission de revenir quelques temps à Paris. Il quitte Bonn fin 1743 en faisant croire à l'Électeur qu'il s'agit d'un départ définitif et prend officiellement congé de la cour, laissant à Bonn son secrétaire, Henry Baumez. Rentré en France, il continue à jouir de sa dignité et de son traitement pendant plus d'un an, les faits n'étant découverts à la cour de Versailles qu'en mars 1745. Suite à la mort de Charles VII, survenue en janvier 1745, la France entend maintenir son soutien à l'héritier bavarois contre la candidature de François de Lorraine, époux de Marie-Thérèse. Le secrétaire d'État des Affaires étrangères, le marquis d'Argenson (qui a succédé à Amelot du Chaillou en novembre 1744), décide de renvoyer Sade auprès de l'Électeur de Cologne. Sade se met en route début février 1745, tandis que la cour reçoit une lettre du prélat demandant un autre envoyé, et découvre finalement la vérité. Arrivé dans les États de l'Électeur, Sade tombe dans une embuscade des troupes franches de Marie-Thérèse et est conduit comme prisonnier à la citadelle d'Anvers. L'abbé Aunillon, protégé de D'Argenson et déjà présent à Bonn, est dès lors nommé chargé d'affaires.
Sade n'est libéré qu'en novembre 1745 et rentre à Paris, à peu près ruiné mais décidé à défendre son honneur et à rétablir sa situation. Candidat à toutes les ambassades vacantes, cible de la haine de D'Argenson qui reporte sur lui sa haine des Condé, de l'hostilité des Choiseul puis de celle du roi, il n'est plus « employé qu'à des missions sans conséquence, sinon sans lustre ». En disgrâce, il se retire sur ses terres de Provence, se consacre à la carrière militaire de son fils, lui trouve un parti et résigne à son profit sa charge de lieutenant général (1763-1764). Réfugié dans la religion et l'écriture, il meurt en 1767 dans sa maison du Grand-Montreuil.

L'auteur de 15 des lettres, Denis Malbran de La Noue (né vers 1677 - mort à Paris le 1er juin 1749, « âgé de 72 ans »), eut une carrière de 33 ans aux Affaires étrangères. Il commença comme secrétaire d'ambassade en Suisse (Soleure) sous Claude Théophile de Béziade, marquis d'Avaray, ambassadeur de novembre 1716 à octobre 1726. Il fut ensuite secrétaire du comte de Plélo, ambassadeur de France au Danemark, de 1729 à sa mort en 1734, puis lui succéda avec le titre de chargé d'affaires de 1734 à 1737. Enfin, il fut ministre de France auprès de la Diète d'Empire (Ratisbonne et Francfort) de 1738 à 1749 ; notons qu'à partir de ces années, son fils travailla à ses côtés, avant de devenir lui-même ministre de France auprès du duc de Wurtemberg et auprès du Cercle de Souabe entre 1744 et 1755.

Les 16 lettres documentent notamment les mouvements de troupes autrichiennes, impériales, prussiennes, anglaises, hanovriennes et françaises (comte de Saxe, maréchal de Broglie, maréchal de Belle-Isle, comte de Coigny) sur les différents territoires concernés. Aucune d'entre elles n'a été éditée par M. Lever, sans doute parce qu'elles s'attachent davantage au déroulement des opérations militaires et ne fournissent pas d'apport direct sur l'action ou la personnalité du comte de Sade.

 

(Les éléments sur le comte de Sade sont tirés pour l'essentiel de la biographie du marquis de Sade par Maurice Lever, dont les deux premiers chapitres sont consacrés à son père : chap. I L'homme à bonnes fortunes, et chap. II Une carrière brisée)

Histoire de la conservation

Documents conservés dans les archives familiales, que Maurice Lever exploita très largement et pour la première fois dans les années 1980-1990 et qui donnèrent lieu à plusieurs publications (3 volumes parus sur les 7 initialement prévus de la collection « Bibliothèque Sade », et biographie du marquis de Sade). Dans l'introduction du tome 1 des Papiers de famille, M. Lever rend d'ailleurs un hommage appuyé à la libéralité du comte Xavier de Sade, qui lui ouvrit les archives familiales pour la réalisation de ses travaux.
Leurs propriétaires, le comte et la comtesse Xavier de Sade, les vendirent ensuite progressivement, jusqu'à leur décès survenu respectivement en 2010 et 2013. Les 16 pièces qui font l'objet de cet inventaire ont été acquises auprès d'eux par la Galerie des Augustins en octobre 1994.
D'autres pièces tirées des archives familiales et concernant le comte Jean-Baptiste de Sade, y compris sur sa mission auprès de l'Électeur de Cologne, passèrent en vente publique en 2016 (vente « Sade, l'autre homme de lettres » chez Tessier-Sarrou et Associés, lots n°3 à 11) ; on ignore leur destination finale.

Modalités d'entrées

Revendication auprès de M. Alain Galant, Galerie des Augustins, 30 rue Carreterie, 84 000 Avignon.
Entrée au CADN le 11 avril 2022.

Présentation du contenu

Lettres de Denis Malbran de La Noue (15 pièces) :

- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 20 mars 1741
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 17 avril 1741
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 8 août 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 20 août 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 3 septembre 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 17 septembre 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 27 septembre 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 3 octobre 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 18 octobre 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 9 novembre 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 12 novembre 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 29 novembre 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 8 décembre 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Ratisbonne, 13 décembre 1742
- Malbran de La Noue à Sade, Frankfort, 5 août 1743

Lettre du maréchal de Noailles :

- Maréchal de Noailles à Sade, Versailles, 10 avril 1743

Évaluation, tris et éliminations, sort final

Ces 16 lettres ne forment semble-t-il pas une série continue ; elles constituent probablement le reliquat de ce qui n'a pas été vendu avant 2022.

Conditions d'accès

Accès libre.

Conditions d'utilisation

La reproduction est libre sous réserve du règlement de la salle de lecture.

Langue des unités documentaires

Français.

Caractéristiques matérielles et contraintes techniques

Lettres restaurées et estampillées à l'atelier du CADN en avril 2022.

Autre instrument de recherche

Description par Bérangère Fourquaux, conservateur en chef du patrimoine (avril 2022).

Documents en relation

Centre des Archives diplomatiques de La Courneuve
Correspondance politique
- Allemagne, 2CP : nombreux volumes couvrant la période concernée, contenant la correspondance de La Noue, de Blondel, du maréchal de Belle-Isle (ces deux derniers envoyés à Francfort), de Sade.
- Allemagne supplément, 5CP/9 : 1739-1740, correspondance de divers avec La Noue à Ratisbonne.
- Cologne, 26CP/73-76, correspondance de Sade (1738-1742).
La correspondance politique conservée ne contient qu'exceptionnellement de la correspondance entre émissaires ; les lettres échangées entre Sade et La Noue ne semblent pas s'y trouver.

Aucun document provenant des envoyés français auprès de l'Électeur de Cologne n'existe parmi les archives rapatriées des postes conservées au CADN. M. Lever mentionne un épisode qui lève une partie du voile sur ce qu'il advint des archives de la légation de Sade à Bonn : outre la correspondance que ce dernier conserva par devers lui, les archives restées à Bonn après son départ fin 1743 étaient sous la garde de son secrétaire Baumez, entré à son service en 1741 à Bonn et assurant l'intérim en son absence. Suite à une enquête du lieutenant général de police diligentée en 1747, Baumez fut emprisonné à la Bastille, accusé d'avoir tenté de vendre à un ministre étranger pour 10 000 écus (30 000 livres) « les chiffres et les papiers de la correspondance de M. le comte de Sade avec la cour de Cologne, depuis le rappel de son ministre ». Il semble qu'il rapporta ces documents à Paris avec lui et qu'ils y disparurent pendant sa détention. Il mourut à la Bastille en novembre 1747 (cf. M. Lever, biographie du marquis de Sade, p. 53 et note 27 p. 669-670).

Bibliographie

LEVER, Maurice, Papiers de famille. Tome premier, Le règne du père : 1721-1760, Paris, Fayard, 1993. [CADN, 8°9052]

LEVER, Maurice, Donatien Alphonse François, marquis de Sade, Paris, Fayard, 1991.

Recueil des instructions données aux ambassadeurs et ministres de France depuis les Traités de Westphalie jusqu'à la Révolution française, XXVIII États allemands, t. II Électorat de Cologne, Georges Livet / Ministère des Affaires étrangères, Éditions du CNRS, 1963, p. 159-208. [CADN, P 2]

Des extraits de la correspondance de Sade avec la cour de Cologne ont été publiés dans :

ENNEN, Leonard, Frankreich und der Niederrhein, oder Geschichte von Statdt und Kurstaat Köln seit dem 30jährigen Kriege bis zur Französichen Occupation, Köln, L. Schwann, 1855-1856, t. II, p. 208-249.

Mémoires de l'abbé Aunillon, chargé d'affaires à Bonn à partir de 1745 :

AUNILLON, Pierre-Charles-Fabiot, Mémoires de la vie galante, politique et littéraire de l'abbé Aunillon Delaunay du Gué, ambassadeur de Louis XV près le prince électeur de Cologne, 2 vol., Paris, L. Collin, 1808. Disponible sur Gallica : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k28675v#