Cote/Cotes extrêmes
Date
Organisme responsable de l'accès intellectuel
Description physique
Origine
Biographie ou Histoire
Aucun élément biographique sur Jean-Jacques Mathis n'a été trouvé en dehors des indications présentes dans le fonds. Établi à partir de mars 1932 (1) au 22, Koutche Nobahar, il est directeur du bureau de Téhéran de deux organismes français privés :
- le Syndicat d'études franco-persanes (SEFP), ensuite Syndicat d'études franco-iraniennes (SEFI) à partir de 1936 (2), puis Comptoir franco-iranien de commerce et de crédit (CFICC) à partir de mi-1938
- la Société franco-persane de recherches (SFPR), ensuite Société franco-iranienne de recherches (SFIR)
Les documents ne permettent cependant pas de bien cerner la distinction entre les deux sociétés : toutes deux ont la même adresse, 16 rue Le Peletier à Paris, et le même personnel de direction : Léon Wenger, président, Jacques d'Aigremont, peut-être André Marcoux (fonction précise indéterminée) (3). Il est fréquent que pour une même affaire, J.-J. Mathis adresse ses rapports à l'une ou l'autre des deux sociétés. Et s'il semble que la SFPR était plus particulièrement spécialisée dans la recherche de gisements miniers, carrières, « forces naturelles » (pétrole), il arrive à J.-J. Mathis d'aborder la question du pétrole dans des rapports adressés au SEFP (4). On apprend par ailleurs que la SFPR travaille en Iran depuis 1929, en lien étroit avec la légation de France (5).
Par le biais du SEFP, J.-J. Mathis agit comme représentant de multiples sociétés, pas exclusivement françaises, dans le cadre de leur fonctionnement habituel en Iran (par exemple Air France ou Bureau Veritas) ou de manière ponctuelle à l'occasion de soumissions pour telle ou telle adjudication (par exemple les Aciéries de Longwy pour de la fourniture de tôle galvanisée).
Travaillant en étroite collaboration avec l'attaché commercial de la légation, Émile Vernazza, il joue un rôle d'intermédiaire entre les sociétés qu'il représente et les autorités iraniennes en charge des nombreux chantiers étatisés ouverts par le régime de Rezâ Shâh. La légation lui transmet les courriers de sociétés françaises intéressées à soumissionner pour telle offre. À l'inverse, J.-J. Mathis passe par la légation pour consulter des sociétés françaises, comme par exemple en novembre 1936 lorsqu'il souhaite proposer des machines françaises pour l'industrie du chapeau de feutre naissante en Iran suite à l'imposition par le régime de nouvelles règles vestimentaires (6).
Personnel de la légation de France en Iran pour la période concernée
(entre parenthèse figure la date de nomination) :
Chef de poste (envoyé extraordinaire) :
Gaston Maugras (16 déc. 1929)
Jean Pozzi (27 août 1934)
Albert Bodard (12 mars 1937)
Attaché puis conseiller commercial :
Émile Vernazza (1929 ou 1930)
Plus largement, l'activité de J.-J. Mathis se place exactement dans le contexte du virage que prend la politique de la France en Iran à partir de 1933 : à des années de « désintéressement » bienveillant pendant lesquelles la France a affiché une position de spectateur, parfois de médiateur, de la rivalité anglo-russe, sauf dans le domaine culturel, succède un élargissement de la zone d'intérêt française destiné à endiguer l'influence de l'Allemagne, symbolisé par le rôle de la mission militaire française en Iran (1933-1938) (7).
Notes :
1 - Une lettre datée du 1er mars 1932 du SEFP à la société allemande Hirsch, Kupfer und Messingwerke AG (8AE/6) indique que J.-J. Mathis partira pour Téhéran le 9 mars. On ignore si ses fonctions à Téhéran commencèrent à cette date ou s'il y exerçait déjà auparavant. Cette lettre présente les particularités du marché iranien et les avantages que trouvent les entreprises à passer par le SEFP et la SFPR, bien établies dans le pays.
2 - Le 21 mars 1935, l'empereur Rezâ Shâh impose aux chancelleries occidentales d'appeler désormais son pays Iran (nom que les Iraniens ont toujours utilisé et qui signifie « terre des Aryens »), le mot Perse renvoyant à une image arriérée et exotique à l'opposé de celle d'un pays en pleine modernisation.
3 - Tandis que Léon Wenger (1879-1962) est une personnalité bien connue du secteur du pétrole de la première moitié du XXe s. (se reporter notamment aux travaux d'Éric Bussière et à la notice biographique qu'il a rédigée dans : J.-C. Daumas (dir.), Dictionnaire historique des patrons français, Flammarion, 2010), les noms de deux de ses collaborateurs ont été extrapolés d'après des courriers de 1938 adressés à J.-J. Mathis : la signature J. d'Aigremont renvoie probablement à Jacques d'Aigremont, qui épouse en 1938 la belle fille de L. Wenger, Barbara A. Gerow ; et un dénommé André Marcoux, industriel, fut témoin au second mariage de L. Wenger avec Marie I. Gerard en 1932 : sous toute réserve, il est possible que la signature présente sur certains courriers corresponde à ce nom. On n'a par ailleurs rien trouvé concernant la carrière de ces deux individus.
4 - 8AE/10, dossier Courrier divers en vrac : rapports de fin 1938 au CFICC sur l'activité de l'Anglo Iranian Oil Company (AIOC, ex APOC). Le pétrole iranien fut découvert en 1908 par les Britanniques, qui fondèrent l'APOC en 1909, concessionnaire des Pétroles du Sud.
5 - Ce n'est qu'au sortir de la Première Guerre mondiale que la France adopte une véritable politique pétrolière, c'est-à-dire fondée sur la production de pétrole via la participation à de nouvelles concessions. Les sources pressenties sont, d'une part, les anciennes possessions de l'Empire ottoman (région de Mossoul) ; d'autre part, la Perse. Mais dans ce dernier pays, les tentatives visant à obtenir la concession des Pétroles du Nord se soldent par un échec, définitif en 1925.
6 - 8AE/10, dossier Adjudications terminées. La loi sur l'uniformisation du vêtement de décembre 1928 oblige les hommes à porter le costume à l'européenne et un képi, remplacé par le chapeau mou après le voyage de Rezâ Shâh en Turquie de 1934. Le port du voile pour les femmes est quant à lui interdit en 1936.
7 - Les relations franco-iraniennes entre 1907 (accord anglo-russe) et 1938 (rupture des relations diplomatiques et renvoi de la mission militaire française) ont été finement étudiées, à partir notamment de la correspondance diplomatique, par Mariam Habibi dans L'interface France Iran 1907-1938 : une diplomatie voilée, Paris, L'Harmattan, 2004. Le fonds de la légation contient quelques documents relatifs au traité d'amitié franco-persan du 10 mai 1929, renouvelé périodiquement jusqu'en 1935 (685PO/A/1).
Histoire de la conservation
Papiers conservés, avec les papiers Antoine Bonifacio (1AE/160) qui leur sont contemporains, à l'ambassade de France à Téhéran, probablement depuis 1939 (les documents s'arrêtent au 15 janvier 1939 et laissent présumer un arrêt brutal de l'activité de J.-J. Mathis). On peut supposer qu'ils furent remis à l'attaché commercial de la légation par J.-J. Mathis lorsqu'il quitta l'Iran ; ou bien qu'en raison de la disparition brutale de ce dernier, ils furent déposés à la légation, par exemple dans le cadre d'une succession. L'absence de tout élément connu à ce jour sur la biographie de J.-J. Mathis laisse la porte ouverte à toutes les conjectures. La consultation des archives conservées de la légation - très lacunaires pour cette période - n'a fourni aucun élément à ce sujet.
Ils ont été rapatriés, sous l'identification « archives françaises » qui englobait aussi les papiers A. Bonifacio, avec les archives russes conservées dans la cave de l'ambassade (fonds de la Brigade cosaque persane, inventorié sur place en 1994). L'ensemble est arrivé à Paris en novembre 1994 ; les archives privées françaises ont été transférées à Nantes en mai 1995.
Sommairement identifiés en 2003, puis récolés en 2013 sous la cote provisoire 4PROV, les papiers J.-J. Mathis et A. Bonifacio ont été séparés, cotés définitivement et décrits en 2019-2020.
Modalités d'entrées
Rapatriement de l'ambassade de France en Iran à la direction des Archives (Paris) en novembre 1994. Transfert à Nantes le 11 mai 1995.
Présentation du contenu
Les dossiers conservés documentent de manière très fragmentaire l'activité de J.-J. Mathis en Iran de 1932 au 15 janvier 1939. Les derniers courriers s'arrêtent en effet à cette date précise, sans que le fonds permette d'expliquer cette interruption brutale. Il est fort probable qu'il faille rapprocher cette dernière de la rupture des relations diplomatiques avec la France décidée par l'Iran du 29 décembre 1938 au 21 février 1939, qui consacra l'affaiblissement de l'influence française à la veille de la Seconde Guerre mondiale (8).
Ils offrent en revanche un résumé de la modernisation effrénée et des profonds bouleversements que connaît le pays depuis la prise du pouvoir par Rezâ Khân Pahlavi en 1921 (9). Ils montrent un aspect concret de la manière dont le secteur économique français, appuyé par les autorités à travers la légation à Téhéran, et en concurrence avec les acteurs étrangers (Allemands, Russes&), s'efforce de prendre sa part sur un marché aux perspectives infinies (développement sans précédent de l'industrie et des travaux publics) mais très contraint par le système de monopole imposé par le régime (10). Ces multiples dossiers de soumissions donnent à voir les grands chantiers étatisés de la période, à commencer par la construction du Transiranien (1927-1938). Le dossier relatif à la SFPR (8AE/1) rappelle quant à lui de manière très concrète les tentatives françaises en matière d'exploitation pétrolière (action de Léon Wenger), dont les résultats en Perse se révélèrent en définitive décevants.
Les dossiers ne permettent cependant pas toujours de connaître l'issue des opérations : si un projet d'offre a finalement abouti, si elle a été retenue, quelle mise en œuvre a suivi. Ils donnent davantage un aperçu des démarches en amont, des échanges avec les relais français ou iraniens établis sur place, de la préparation des offres. À ce titre, les documents les plus intéressants sont les doubles des rapports adressés par J.-J. Mathis aux bureaux parisiens du SEFP et de la SFPR, dans lesquels il rend compte de manière libre et détaillée des démarches en cours et des perspectives sur telle ou telle opération.
Notes :
8 - Cet affaiblissement se concrétise par quelques décisions marquantes visant à rejeter toute influence étrangère, notamment française : rupture des relations diplomatiques avec la France le 29 décembre 1938, renvoi des derniers officiers de la mission militaire française le 31 décembre, éviction à compter du 21 mars 1939 de tous les fonctionnaires européens travaillant pour le gouvernement iranien. Il est possible que ces circonstances se soient répercutées sur l'activité des sociétés privées, et que le bureau de J.-J. Mathis ait plié bagages et mis ses dossiers à l'abri à la légation en attendant des jours meilleurs, qui ne vinrent finalement pas.
9 - Devenu Rezâ Shâh en décembre 1925 après la déposition du dernier empereur Qâjâr, Ahmad Shâh.
10 - L'abolition du régime des capitulations et des concessions étrangères (sauf le pétrole) en mai 1928 marque le début d'une nouvelle politique économique de la Perse, fondée sur l'intervention de l'État et la rente pétrolière. En 1931, le commerce extérieur est décrété monopole d'État.
Évaluation, tris et éliminations, sort final
Fonds très incomplet, sans doute en raison de ses mauvaises conditions de conservation à l'ambassade, qui ne fournit qu'un modeste aperçu de l'activité de J.-J. Mathis en Iran. Les documents rapatriés ont été conservés en intégralité, à l'exception de quelques prospectus commerciaux en nombre, éliminés en décembre 2020.
Accroissements
Fonds clos.
Mode de classement
Le caractère fragmentaire du fonds, qui se résume à une série de dossiers individuels (thèmes ou raisons sociales) empêche d'appréhender le fonctionnement d'ensemble du bureau dirigé par J.-J. Mathis, l'ampleur de son activité et de ses archives, et le mode de classement d'origine de celles-ci ; les titres présents sur les chemises ont été entièrement repris dans les analyses.
On a classé en tête (8AE/1-2) les documents généraux sur le fonctionnement des deux sociétés dont J.-J. Mathis était l'agent à Téhéran (SEFP et SFPR) ainsi que des études sur divers aspects de la législation et de la production iraniennes. Vient ensuite (8AE/3-8) la série de dossiers constitués pour les différentes soumissions auxquelles répondait J.-J. Mathis pour des entreprises, principalement françaises. Ont été regroupés à la fin (8AE/9-10) les documents se rapportant au même objet mais regroupés en dossiers thématiques ou laissés en vrac, et un peu de documentation isolée.
Conditions d'accès
Les documents sont librement communicables sous réserve des dispositions prévues par la loi pour le respect de la vie privée (Code civil, art. 9) et de la propriété intellectuelle (Code de la propriété intellectuelle).
Conditions d'utilisation
La reproduction est libre sous réserve des dispositions prévues par la loi pour le respect de la vie privée (Code civil, art. 9) et de la propriété intellectuelle (Code de la propriété intellectuelle), et du règlement de la salle de lecture.
Langue des unités documentaires
Caractéristiques matérielles et contraintes techniques
En raison de leur séjour prolongé dans la cave de l'ambassade, les documents sont dans leur ensemble très empoussiérés. Certains portent la trace de la dent des rongeurs. Seules les quelques pièces dont l'importante dégradation due à l'humidité empêchait la manipulation ont été restaurées en janvier 2021 (article 5).
Autre instrument de recherche
Répertoire numérique détaillé par Bérangère Fourquaux, conservateur en chef du patrimoine, décembre 2020.
Documents en relation
Centre des Archives diplomatiques de La Courneuve
Correspondance politique et commerciale (1918-1940), série E - Asie :
- 40CPCOM Perse / Iran (1918-1940)
Papiers d'agents Archives privées :
- 348PAAP Papiers Jean Pozzi (1921-1965)
Centre des Archives diplomatiques de Nantes
Archives rapatriées des postes :
- 685PO/A - Téhéran légation puis ambassade (1708-1970)
Le fonds de la légation (jusqu'en 1942) est extrêmement lacunaire du fait des destructions opérées en 1941-1942 et ne contient pratiquement rien (pas de correspondance) pour la décennie 1930-1940. Les dossiers de l'attaché commercial É. Vernazza ont entièrement disparu (11).
Notes :
11 - CADN, Archives de la direction des Archives, 13ACN/281, dossier Téhéran ambassade : un télégramme du 15 juillet 1946 indique que « la presque totalité des archives de cette ambassade [ont] été détruites en 1941-1942 ». Il s'agit en réalité des archives de la première moitié du XXe siècle, la correspondance reliée du XIXe siècle ayant quant à elle été préservée.
Bibliographie
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Mots clés lieux
Mots clés matières
Mots clés producteurs
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